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L'hypnose peut-elle tout guérir ?

Un article de Michèle Roger, paru dans Flair L'hebdo en 2000.

Cela fait des mois que vous tentez de maigrir ou d'arrêter de fumer. Votre asthme vous empoisonne la vie et vous ne savez plus que faire... Quand une amie vous parle de l'hypnose, vous vous dites que vous essaieriez bien, mais vous ne savez pas exactement ce que c'est, et puis ça vous inquiète un peu... Flair L'hebdo vous aide à y voir plus clair.

Elle fascine et se pratique depuis la nuit des temps. Dans l'Egypte et la Grèce ancinne, l'hypnose était reconnue comme médecine et pratiquée par des prêtres, des sorciers, des druides... Au Moyen Age, par contre, elle était assimilée à de la sorcellerie et conduisait au bûcher...

Plus près de nous, Freud l'a utilisée pendant neuf ans avant de l'abandonner parce qu'elle ne lui permettait pas de découvrir les causes réelles des problèmes psychiques qu'il traitait. Et c'est à un psychiatre américain, décédé en 1980, Milton Erickons que l'on doit la "nouvelle hypnos", celle que l'on pratique aujourd'hui.

Qu'est-ce que l'hypnose

Définir l'hypnose ? Rien de plus facile... et de plus difficile ! Les scientifiques l'expliquent comme un "état modifié de conscience", se situant entre veille et sommeil. Un terme obscur pour signifier une situation que nous vivons tous plusieurs fois par jour. Nous ne sommes pas endormis mais pas vraiment vigilants. Nous rêvassons, nous sommes dans la lune, nous sommes tellement absorbés par une tâche que nous ne nous rendons pas compte du temps qui passe... En consultation, le thérapeute induit cet état, avec la participation volontaire du patient. "La personne hypnotisée ne deviendra pas plus obéissante et n'accomplira jamais un geste allant à l'encontre de sa morale ou de sa volonté", explique le Dr Eric Mairlot, neuropsychiatre, président de l'Institut de nouvelle hypnose. "Mais son inconscient va reconnaître les suggestions, émises par le médecin, qui élimineront son problème de santé. Comme celles qui le rendront plus créatif."

Le poids des mots

Comment parvenir à cette transe ? Alors que vous êtes confortablement installée, le spécialiste vous demande de fermer les yeux ou de fixer un point : une précaution destinée à se couper d'éventuelles distractions. Puis de vous concentrer sur votre respiration, sur la position de vos bras ou de vos jambes... Il utilise un ton monocorde, des phrases souvent répétitives, un débit de voix très lent. "Car le rythme de notre cerveau n'est pas rapide et nous avons besoin de lenteur pour apprendre !" Il s'exprime beaucoup par métaphores et ses mots sont inconsciemment concrétisés, en fonction de notre personnalité ou de notre vécu. "Si je dis 'beauté', l'un pensera à une silhouette, son voisin se souviendra d'un paysage", précise Daniel Araoz, professeur de psychologie à l'université de New York et formateur en hypnothérapie aux USA. Hypnothisé, on semble endormi : la respiration est plus profonde, le rythme cardiaque ralenti, les muscles relâchés... Et pourtant, un EEG (électro-encéphalogramme) réalisé à ce moment-là enregistrerait une activité électrique aussi intense qu'à l'état de veille !

Pensez positif !

Le professeur Daniel Araoz est clair : "Si j'imagine quelque chose de positif, je peux le concrétiser. Prenez l'exemple des fumeurs. Ils identifient le sevrage comme une étape difficile, douloureuse. Ils devraient plutôt se concentrer sur cette petite phrase : "Je peux abandonner cette dépendance. Et ils réussiront leur pari." Les praticiens le savent bien : pas question de prononcer n'importe quelle phrase, d'inciter à n'importe quelles suggestions. "À une personne souhaitant maigrir, je ne dirais pas qu'elle va 'perdre du poids'. Perdre une partie de soi est, en effet, angoissant pour l'inconscient." De la même manière, quand votre dentiste affirme : "Vous n'aurez pas mal", votre inconscient n'entend que le mot 'mal' ! Et déjà, vous vous crispez, ce qui ne fait qu'augmenter la sensation inconfortable. Voilà pourquoi les termes utilisés sont primordiaux. Et afin que le spécialiste trouve les images les plus appropriées à son interlocuteur, un entretien préalable - au moins - reste indispensable.

Inégaux devant l'hypnose

 Qui est hypnotisable ? Tout le monde... sauf les schizophrènes décompensés, les paranoïaques, les dépressifs profonds. Plonger facilement dans cet état n'est aucunement un signe de faiblesse. Au contraire, certaines expériences ont prouvé que les individus les plus hypnotisables seraient aussi les plus équilibrés. Des revues scientifiques très crédibles ont démontré que l'hypnose thérapeutique, comparée aux traitements médicamenteux, offre quelquefois des résultats nettement supérieurs. Les pathologies concernées sont l'ulcère gastro-duodénal récidivant, la colite spastique, certains asthmes bronchiques (allergiques ou non), les acouphènes (perceptions de bruits dans les oreilles), les démangeaisons, les eczémas, etc. Et pourtant, parfois, les résultats ne se révèlent pas à la hauteur des espérances du consultant. "Certains sont plus doués que d'autres", reconnaît le Dr Eric Mairlot. "A titre de comparaison, même si chacun ne sait pas parfaitement dessiner, bon nombre d'entre nous sommes capables de crayonner."

Du stress au trac

Les indications de l'hypnothérapie sont variées : outre celle précitées, mentionnons encore les migraines, les symptômes allergiques, la spasmophilie, les phobies, les troubles obsessionnels, la boulimie, les problèmes sexuels, le stress, le trac, les insomnies, etc. Pendant la grossesse, cette méthode peut atténuer les contractions utérines, lesquelles risquent d'entraîner un accouchement prématuré. Au Centre Hospitalier Universitaire de Liège, le Dr Marie-Elisabeth Faymonville, anesthésiste, hypnotise des opérés. Ces derniers bénéficient juste d'une légère sédation et d'une anesthésie locale (plutôt que générale) : pour le reste, la voix du Dr Faymonville, leur proposant de s'immerger dans des souvenirs heureux, suffit ! Cette approche est utilisée lors d'interventions de la thyroïde, d'opérations esthétiques, de changements de pansements chez les grand brûlés (un geste très douloureux) et pour diverses opérations pratiqués chez les enfants, qui semblent plus réceptifs à l'hypnose. Peut-être parce qu'ils arrivent avec moins d'a priori ?

3 Questions sur l'hypnose

Y a-t-il une différence, mis à part l'objectif, entre l'hypnose de spectacle et l'hypnose thérapeutique ?

"Oui. Comme les hypnotiseurs de music-hall doivent agir vite (pour accrocher leur public), ils misent sur l'autorité et la fascination. Leurs inductions sont très directives : 'Regardez-moi dans les yeux, faites ce que je veux, c'est moi qui décide !' On peut utiliser cette forme d'hypnose dans un service d'urgences psychiatriques : là, les patients arrivent terriblement confus ou angoissés, cela leur permet d'être calmés rapidement. Cependant, mieux vaut savoir que parmi ces hommes du show-biz, il y a aussi quelques tricheurs et illusionnistes..."

Les résultats sont-ils toujours présents ?

"Cela dépend. Certains patients manquent de motivation réelle : ils viennent par curiosité, sans but précis. D'autres sont trop impatients : la méthode n'est pas efficace dès la première séance ! La répétition des suggestions est également importante. Enfin, la confiance en son thérapeute doit être suffisante ! En revanche, si vous n'aimez pas sa voix, ce n'est pas un problème car votre inconscient va modifier ce son. Si sa tête ne vous revient pas, ce n'est pas essentiel, car vous fermez les yeux..."

Peut-on confondre l'hypnose avec une forme d'hyper-relaxation ?

"Non. notamment parce qu'on ne perçoit pas les éléments extérieurs de la même manière. Les bruits semblent plus lointains, la lumière plus claire ou plus sombre, la température plus élevée ou plus fraîche... L'hypotiseur est capable d'induire des modifications de ces sensations afin de soigner, par exemple, des démangeaisons, des sifflements, dans les oreilles ou des brûlures."

 

Quand ça marche...


Voici deux expériences relatées par le Dr Eric Mairlot.

L'hypnose contre l'asthme

"L'un de mes jeunes patients, âgé de 12 ans, était asthmatique, sensible à 19 allergènes. Lors de la première séance, il s'est présenté avec un début de crise. Afin de la stopper, j'ai eu recours à des techniques d'imagerie mentale. Ainsi, alors qu'il était en hypnose, j'ai fait un parallèle entre son problème et l'apprentissage du judo, utilisé ici pour se défendre d'un inconnu menaçant. J'ai suggéré au gamin une préparation physiologique : son coeur battait de manière accélérée afin d'envoyer plus de sang dans ses muscles, ses poumons s'ouvraient pour mieux oxygéner le sang, etc. Une semaine après, l'enfant est revenu, content d'avoir réussi à calmer chacune de ses crises. Il avait 'simplement' reproduit la séance que nous avions pratiquée ensemble. Avec le temps, il a dû faire de moins en moins d'auto-hypnose. La guérison, quasi complète, a eu lieu un an après..."

Et contre les colites

"une patiente souffrait, depuis de longues années, d'une colite se manifestant plutôt bruyamment. En état d'hypnose, elle imaginait, sur mes suggestions, d'absorber une tisane aux vertus relaxantes. Elle suivant le parcours du breuvage le long de son tube digestif et dès que la boisson apaisante parvenait à ses intestins, les gargouillis de son ventre se sont subitement fait silencieux ! Là, la métaphore s'est révélée juste mais si cette femme n'avait pas aimé les infusions, les symptômes ne se seraient probablement pas évanouis aussi vite."

Quand ça ne marche pas


Echec sur la cigarette

"Sur les conseils d'une collègue, qui avait réussi à arrêter de fumer grâce à l'hypnose, j'ai voulu essayer", raconte Adriana, 37 ans. "Mon attente était vaste (peut-être trop ?) : stopper la cigarette, traiter ma boulimie, me soutenir dans le suivi d'un régime... j'ai pris rendez-vous chez un médecin en qui j'avais une totale confiance car il avait déjà soigné mon père. La première séance ? Elle n'a jamais eu lieu car, avant d'arriver au cabinet médical, je m'étais sérieusement perdue... alors que je connaissais le quartier ! Etrange, non ? Au deuxième rendez-vous, même mésaventure : plus moyen de retrouver la maison de l'hypnothérapeute. J'y parviens enfin, mais en retard... Après m'être allongée et avoir fixé un carton parsemé de dessins, j'ai écouté sagement les suggestions positives du praticien. Lesquelles affirmaient : 'Je respire mieux, je suis attirée par des aliments sains, etc.' Je me sentais bien... mais surtout bien éveillée ! Et absolument pas en état d'hypnose. Après cette première expérience décevante, nous avions décidé, le thérapeute et moi-même, d'en rester là. Tout dans cette histoire (les retards, le fait de me perdre, etx.) prouvait que l'hypnose n'était pas pour moi. J'étais une cérébrale, j'avais besoin de garder le contrôle... Pourtant, cet échec m'a attristée. Et je ne serais pas opposée à réessayer !"

Et sur le régime

"Au régime depuis plusieurs mois, j'étais devenue obsédée par les calories, les aliments, les cuissons minceur", confesse Mary, 24 ans. "Pour m'en sortir, une diététicienne m'avait recommandé de voir une hypnothérapeute. Ce fut un fiasco total : je n'ai jamais accroché avec cette praticienne, j'avais l'impression que les suggestions ne me concernaient pas, je ne comprenais pas où elle voulait en venir, etc. Après une dizaine de séances (d'où je sortais malgré tout très détendue !), j'ai arrêté. Aujourd'hui, je suis plus sceptique face à cette approche..."

 

En pratique

Une séance dure de 45 à 60 minutes, le prix est d'environ 2000 FB. Les consultations suivies chez les psychiatres bénéficient d'un remboursement INAMI. L'hypnose est, en effet, reconnue comme une pratique médicale, diagnostique et thérapeutique.

Institut de Nouvelle hypnose et de psychosomatique. Cet institut forme des professionnels de la santé et organise des ateliers d'auto-hypnose pour tout public.

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Presse écrite